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  "Votre magnifique performance, votre première bataille, ont matériellement raccourci la route qui mène à la victoire."

General Harry L. Twaddle, commandant de la 95th Infantry Division

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La tête de pont d'Uckange - Operation Casanova
Date : Du 8 au 14 Novembre 1944
Lieu des faits : Uckange, France
Unité présente : 1st Battalion, 377th Inf. Reg.

 

Ci-dessus : La traversée de la Moselle à Uckange se fit dans des bateaux de ce type. Cette photo fut prise lors d'un entraînement du 377th Infantry Regiment

  A la mi-Novembre 1944, le projet de réaliser un véritable franchissement à Thionville était planifié, mais il fallait persuader les Allemands que le franchissement aurait lieu au Sud de Thionville. Le besoin de créer une autre tête de pont faisant "diversion", était demandée. L'unité désignée pour cette mission nommée "Opération Casanova" était le 1st Battalion du 377th Infantry Regiment tandis que les deux autres unités de la Division, le 378th et le 379th Infantry Regiment, contiennent le saillant fortifié occidental autour de Metz. Le rapport de la mission spécifie que l'attaque sera menée le 8 Novembre, soit un jour avant que le XXth Corps ne se mette en route. Ainsi, le premier sang versé dans la bataille finale de Metz sera versé par les "nouveaux gars" de la 95th Infantry Division.

  Le 1st Battalion avait été choisi pour traverser la rivière et, après le mouvement effectué depuis le Sud de la tête de pont, il est transféré sur la berge de la rivière dans le Sud d'Uckange. Tous les marquages de la 95th Infantry Division ont été enlevés, de faux messages de circulation sont maintenus et ils se camouflent comme des hommes du 359th Infantry Regiment en route vers le Nord, en direction d'Aumetz. Ils ont pour mission de franchir la Moselle, de traverser la plaine inondée sur l'autre rive, et d'occuper la localité d'Immeldange, à cheval sur la route principale Nord-Sud entre Metz et Sierck-lès-Bains. Ils devront alors s'enterrer et attendre d'être relevés par des troupes descendant du principal site de franchissement.

Ci-dessus : Carte de l'opération Casanova

(du 8 au 14 Novembre 1944).

  Les déplorables conditions météorologiques font annuler l'attaque aérienne préliminaire prévue contre les Allemands installés sur l'autre rive mais une concentration d'artillerie a bien lieu. Au crépuscule, une company du 320th Combat Engineer Battalion se glisse par-delà la rivière, fait exploser des mines et ouvre une brèche dans les barbelés. A 21 heures, la Company C du 377th Infantry Regiment traverse en pagayant dans 17 barques d'assaut sur une distance d'environ 200 mètres. Une fois arrivés de l'autre côté, elle ne rencontre pas d'opposition de la part des Allemands qui sont retranchés un peu en arrière, le long de la ligne de la route principale et le régiment 73 de la 19 VG Division mettra un certain temps à réagir. Celà est surprenant à cause des activités des sapeurs du Génie qui avaient fait un terrible vacarme.

  Le petit groupe de fantassins avance de quelques 400 mètres à travers la plaine inondée informe et il s'enterre pour attendre l'aube. C'est alors que l'artillerie allemande s'abat sur eux tandis qu'ils se trouvent à portée de la concentration de canons qui a été amassée pour contrer les attaques précédentes sur Maizières-lès-Metz. Cependant, la plupart des obus tombent derrière la Company C, sur le site de franchissement où les sapeurs du génie essaient frénétiquement de lancer une passerelle pour piétons. A cause de ce bombardement, celle-ci est abandonnées, et la Company A est transférée de l'autre côté dans les premières heures du 9 Novembre. Cependant, c'est alors que le temps montre son influence funeste. La nuit précédente, alimentée par des pluies torrentielles, la rivière commence à déborder et, dans la matinée, elle recouvre les berges. Les eaux turbulentes se sont répandues sur la plaine inondée, doublant la largeur normale de la rivière et accroissant fortement la vitesse du courant. La route approchant le site de franchissement a disparu sous les eaux et tous les efforts pour tendre un fil téléphonique sont anéantis par le courant. Ainsi, les seuls moyens de communication sont assurés par une frêle liaison radio.

  A l'aube du 9 Novembre, le 1st Battalion a transféré deux compagnies d'infanterie et une section d'armes lourdes de l'autre côté de la rivière tourbillonnante. Elles recommenceront alors à avancer vers l'intérieur, dépassent le village de Bertrange et s'établissent sur une colline basse vers l'Est, hors de portée de l'eau envahissante. Bien qu'il n'y ait pas de menace directe de l'infanterie allemande, les tirs de l'artillerie et des mortiers tombent drus et les hommes s'enterrent pour maintenir un peu de chaleur. A 9h55, le bataillon transmet ce rapport au QG du régiment : "Deux compagnies ont traversé la rivière. La rivière est très haute et nous n'allons pas en envoyer d'autres".

 

Ci-dessus : Dessin du PFC Ernest. L. Deal de la Company A, représentant le largage de vivres et munitions par des avions de l'observation d'artillerie.

L'inondation empêche toutes les tentatives de ravitaillement des deux compagnies qui sont alors complètement isolées. La vitesse du courant et les tirs précis de l'artillerie allemande rendent toute traversée de la Moselle de jour plus ou moins impossible, même quand des moteurs de hors-bord sont placés sur les embarcations d'assaut. Il est ainsi décidé de tenter un ravitaillement aérien avec les avions de l'observation d'artillerie. Dix L-4 s'envolent cet après-midi-là avec un "largeur" qui s'est porté volontaire pour s'installer derrière le pilote. En volant à seulement 25 pieds (environ 8 mètres) d'altitude, ils tentent de larguer 1080 rations K, 46000 cartouches, 4000 balles de calibre .50, du ravitaillement médical, des cigarettes, des tablettes pour purifier l'eau, du plasma et un sac de papier hygiénique. Les largages sont certainement précis et un chef de section dira : "Nous avons obtenu des avions toutes les rations dont nous avions besoin." Le major Neumann, qui a effectué plusieurs missions aériennes, racontera qu'il pouvait "voir quelques-uns de nos hommes, debout dans l'eau dans leurs trous individuels. Ils faisaient signe et criaient quand nous jetions quelques rations juste à côté de leurs trous individuels". C'est la première des nombreuses occasions où, pendant la Bataille de Metz, de tels avions légers seront utilisés pour des missions de ravitaillement de troupes isolées.

 

Ces photographies exceptionnelles montrent les hommes incorporés aux avions de l'observation d'artillerie de la Division. Parmi eux, certain jouèrent un rôle primordial durant la Tête de pont d'Uckange lors de missions de ravitaillement.

A gauche : Pilotes et observateurs réunis devant un avion L-4

Ci-dessous : L'équipage au sol à savoir mécaniciens, opérateurs radio, médecins, et cuisiniers.

  Une indication de l'attitude chevaleresque, qui prévaut alors, est fournie lorsqu'un bateau, chargé de personnel médical et déployant la Croix Rouge, tente de traverser la rivière. Entraînés par le courant, sur l'autre rive, ils tombent sur deux soldats allemands qui émergent d'un abris. En bon anglais, ils disent aux infirmiers qu'ils sont au mauvais endroit et ils leur indiquent l'aval. Quelque peu perplexes et méfiants, ils tentent de retourner à leur point de départ où le chef de bataillon les redirige. Engagés dans une nouvelle tentative, ils traversent la rivière et pagaient sur la plaine inondée et arrivent ainsi en lisière de Bertrange. Là, un officier allemand apparaît et leur dit : "Ici, pas de troupes américaines. Nous soignons un blessé américain. Vos troupes ? Là-bas." Il leur indique alors l'endroit où les Américains sont enterrés.

  Le 10 Novembre, malgré le danger de givrage sur les ailes, d'autres missions de ravitaillement ont lieu. On se préoccupe du largage d'obus de mortiers qui risqueraient d'exploser à l'impact. En guise de test, un avion survole la localité de Bertrange, tenue par les Allemands, et largue quelques obus sur des cochons d'inde. Ne remarquant pas d'explosions, les pilotes supposent qu'ils peuvent larguer sans risque les obus sur leur propres hommes.

  Pendant la nuit du 11 au 12 Novembre, l'inondation commence à se résorber et, la nuit suivante, il devient possible de transférer le reste du bataillon sur l'autre rive. Ceci est réalisé sans pertes car les sapeurs du Génie ont distrait l'attention des observateurs d'artillerie allemands par une traversée fictive en faisant marcher leurs hors-bords.

  L'opération de la tête de pont d'Uckange ne réussit pas à attirer un nombre significatif de réserves allemandes. L'attaque principale, qui commencera le lendemain, sera aussitôt repérée comme étant la plus importante poussée. Ainsi, l'effet de surprise est perdu. La 19 Volksgrenadier Division n'a pas de réserves à engager et réalise rapidement que les Américains impliqués dans cette attaque sont peu nombreux. Les Allemands ont alors identifié la 10th Armored Division au nord de Thionville et ont même observé l'accumulation de matériel de pontonement dans le secteur. 

  Le 2nd Battalion du 378th Infantry Division commandé par le colonel Maroun, qui réussit à traverser par la véritable tête de pont à Thionville, reçoit l'ordre de se regrouper avec quelque tanks et tanks destroyers et d'attaquer vers le Sud pour relever les défenseurs de la tête de pont d'Uckange. 

  Durant la matinée du 13 Novembre, la 95th Infantry Division donne l'ordre au 1st Battalion d'avancer vers le Nord, de passer à Bertrange et Immeldange et de prendre Illange où il fera sa jonction avec les hommes du colonel Maroun. Les hommes de ce battaillon prennent dans difficulté les deux premières localités mais, alors qu'ils se regrouppent avant de reprendre la progression, ils sont attaqués par un groupement tactique du Grenadier Regiment 73, appuyé par quelques canons antichars. Les forces se trouvant dans les deux localités sont alors séparées et se jettent au sol lorsque les Allemands circulent dans un bruit d'enfer tout au long des rues principales dans des véhicules blindés de transport de troupe, tirant sur tout ce qui bouge. Les Américains n'ont alors plus de communications avec leur artillerie située sur la rive occidentale.

  Celles-ci ne seront rétablies que dans la matinée du 14 novembre, avec un First Sergeant de la Company A faisant fonction d'observateur avancé. Cependant, malgré l'efficacité habituelle de l'artillerie Américaine, les Allemands ne sont pas facilement découragés. Ils poussent leurs attaques toute la journée, appuyés par des véhicules blindés légers, à tel point qu'à 22 heures le chef de battaillon américain signale que sa position est "désespérée". Il suffit de se rappeler que les hommes du 1st Battallion sont seulement armés de ce qu'ils peuvent emmener avec eux et qu'ils combattent sans interruption depuis le 8 Novembre au soir.

  Durant la soirée, les communications sont à nouveau interrompues et, dans la matinée du 15 Novembre, les restes du bataillon tiennent toujours dans les ruines des deux villages. La force de Bacon arrive juste à temps et, utilisant ses tanks destroyers comme de l'artillerie automobile, le Colonel Bacon ouvre le feu sur les Allemands se trouvant à Bertrange et Immeldange et, à 13 heures, les forces encerclées sont relevées. Cependant, leur puissance a été réduite à une poignée d'hommes et d'officiers mais, au lieu d'être envoyées en réserve, elles sont aussitôt intégrées à la Task Force Bacon.

  A 23h45, le 15 Novembre, le Colonel Bacon, reporte les informations concernant les unités du 1st Battalion. (A savoir que pour chaque company, l'effectif de départ était d'environ 180 hommes.)

Company A : 1 officier et 42 hommes

Company B : 1 officier et 39 hommes

Company C : 4 officiers et 107 hommes.

  Les chiffres montrent à eux seuls le prix que le 1er bataillon a payé pour le succès de l'Opération Casanova. Les résultats sont certes tangibles, mais il est clair que le 1st batallion a apporté sa contribution au succès global de l'opération de Metz. Le battaillon attira de puissants tirs d'artillerie allemands dans la zone d'Uckange, permettant ainsi à la 90th Infantry Division de traverser à Koenigsmacker et au 2nd Battalion du 378th Infantry Regiment à Thionville. Par ailleurs, le 1st Battalion obligea les Allemands à utiliser des chars  et de l'infanterie pour tenter d'éliminer une tête de pont qui n'avait que pour objectif de faire diversion. Les Américains tiendront le terrain malgré les contre-attaques et le 16 novembre, ils continueront à progresser vers le Sud avec la Task Force Bacon  qui jouera un rôle majeur lors de l'assaut final sur Metz.